Le regard
Il n’y a nulle place particulière lorsque je suis à Paris, nul endroit particulier, nul projet, je vais selon mon désir qui ne me laisse aucun répit jusqu’à ce que je l’aie satisfait.
Ce jour là je me décidai pour aller à Opéra en autobus. (Je connais les lignes par cœur pour les pratiquer : 28 38 68) Et pourtant ce jour là je bûchai devant mon plan, m’accrochai à de longues recherches munie de mes lunettes et de ma loupe. Je m’embarquai pour l’autobus 28 qui va à la gare St Lazare ; Dans mon petit nid que j’arrange avec soin, je dors, je mange, et hop je vais me balader dans Paris que j’adore. Je vais aux grés de mes fantaisies, je rentre fatiguée.
Poussée par l’envie d’aller à Opéra avec la ligne 28 je pris l’autobus sûre de moi. Entourée de gens de tous genres j’étais confiante, rien ne me rassure autant et je me sens bien. J’étais donc installée une place libre à coté. Des gens debout, bizarrement la place était libre jusqu’au moment où une créature qui était conçue pour faire frémir qui la regardait :
- Excusez-moi madame
- je vous en prie.
Je garde messieurs, mesdames à qui je m’adresse en ce moment un visage de femme qui me donna l’impression d’avoir été détruit par un tremblement de terre, l’ossature était bouleversée, c’était effrayant. Et pourtant mes amis, j’ai un nœud dans la gorge en y pensant et une pensée affectueuse pour cette personne. A peine assise elle se tourna vers moi, et je vis un regard, le regard du chien fidèle qui réclame, prêt à tout pour de l’amour, je m’accrochai à mon siège le cœur comblé ; Je demandai du tac au tac à la personne en face l’arrêt pour Opéra ; alors la femme à l'ossature du visage bouleversée se tourna vers moi, m’expliqua, et j’eu l’énorme joie de lui voir un visage humain. Elle était très maigre, malade peut être ! Je changeai d’itinéraire et pris le parti de descendre au rond point des Champs Elysée ; Je la remerciai, elle s’était plue à me renseigner, nous étions quittes et apaisées. Mais depuis j’ai dans mes yeux ce regard qui me donne envie de regarder par la fenêtre comme elle faisait.
Liliane Boyrie 05 16 2010