La jeune fille du couloir
Le passage est réservé aux galeries, sur la porte est affiché le nom de l’artiste avec la photo d’une œuvre.
La porte poussée, j’étais dans un couloir. Au dessus une estrade éclairée par une verrière.
Quelques marches permettaient d’y accéder. Dans la pénombre une personne assise près d’une table. J’hésitai une fraction de seconde. Pendant un bref instant je n’eus plus la notion du temps. La jeune femme s’élança vers moi en trois enjambées elle était à moi. De l’allure souple et rapide d’un chat qui attrape sa proie elle était près de moi.
- Madame puis-je vous renseigner ? Je hoquetai un :
- Oui. J’étais effondrée. En la regardant je fus transportée dans un monde lointain. Dans mon imagination je la voyais parmi les hommes de l’age de pierre, et dans ce minuscule couloir de l’histoire du monde avec la chaise et la table « allez savoir… la nature est si riche en surprises… ! » en l’écoutant je sentis en moi la résonance du non vécu durant ces heures passées, là ! Et, à ce moment là, il y eut en moi un détachement des êtres et des choses…
C’était une fille simple, jeune : un buste d’adolescente, une taille souple et fine, de longues jambes ; je retins ma respiration afin de mieux capter l’ambiance insolite et inattendue.
Dans ce morne couloir, et devant son visage, sa voix au timbre délicat plein d’amour, de bonheur, d’espoir, était surprenante. Je tâtonnai à la recherche d’un appui. Son désir de plaire de vous plaire était communicatif ; je la fis répéter afin de mieux l’entendre.
- Pardon ?
- Madame ! Il y eut dans sa voix un léger frémissement d’énervement
- Oui ?
- Là, là. Devant vous seulement. Montez !
Je bégayai un merci maladroit, je montai quelques marches, m’arrêtai afin de me retourner.
La jeune fille du couloir avait repris sa place.
Liliane Boyrie
19 10 2009