L’air humide de la journée embaume la pièce
Dans une plainte douloureuse elle balbutie ces mots
Ah ! Je l’aime
La dame dans sa pièce la twingo bien alignée dans l’allée ;
L’air chaud embaume la pièce du parfum subtil des petites fleurs odorantes qui bordent le chemin. La dame la tête dans ses mains, dans une plainte douloureuse balbutie ah ! Je l’aime ! Je l’aime ! Je ne peux pas me contenir, il faut que ma passion éclate avant de le voir. Elle fend la pièce de pas nerveux vers les livres sur la Sagesse, les martèle du poing, les invective de mots les plus durs et dans un accès de passion suprême elle jette ses livres adorés à terre, tape du pied sur eux : non, non, je l’aime totalement. Elle navigue dans sa pièce les poings contre sa tête, se flagelle, cherche à apaiser ses pulsions dévastatrices.
L’esprit en perpétuel tourment, le vieil homme à la tondeuse à gazon désire la dame. Il veut l’embrasser, la caresser, couvrir son corps de baisers, il veut la prendre, meurtrir son corps, meurtrir ses chairs, la broyer dans ses bras, dans son ventre, il est fou d’elle. Que va-t-il devenir ! : Une vie simple, des désirs comblés lorsqu’il était dans les ports au-delà des mers lointaines, mais là, devant la dame de la twingo qu’il respecte il souffre de son impuissance à dire les mots. Pleins de sentiments contradictoires il mélange les filles des ports des mers lointaines et la dame de la twingo. La dame, la merveilleuse dame s’échappe chaque fois qu’il va dire le mot, le seul mot, l’unique mot, le sublime mot, il n’y arrive pas.
Aujourd’hui mercredi. Ce jour chéri elle va le vivre avec le vieil homme, et pour le conquérir elle va choisir parmi ses habits des couleurs pastel. Devant la glace elle s’observe, se tourne, se regarde dans tous les angles, soupire tant son cœur est lourd.
Le vieil homme l’attend les chaises installées.
- Monsieur, ne prenez pas tant de peine, allez-vous bien aujourd’hui ?
- Ce moment là est heureux madame.
La dame sous son ombrelle, le monsieur en face, la twingo en bordure du trottoir.
- Monsieur ! Monsieur ! Si vous saviez comme je suis malheureuse !
- Malheureuse madame !
- Mon cœur est malade il souffre !
- Mais pourquoi ? Madame.
- Il saigne. Nous avons détruit le rêve monsieur. Quelles catastrophes va-t-il nous arriver ! Où allons nous ! Qu’allons nous devenir sans le rêve !
Devant ce déluge de désastres annonçés par sa dame, l’homme est sans voix : Le pauvre homme n’avait pas prévu une telle histoire. (Un vrai drame pour la dame) : Dans sa pinasse face aux éléments dévastateurs, manipulant ses appareils de navigation dans tous les sens pour les combattre, jouissant de tous les plaisirs que lui offrait notre mère nature lors de ses escales dans les ports, ce gaillard, ce géant des mers, cet athlète aux muscles durs gonflés par l’effort devant la dame perd la notion du temps.
- Je vous aime ! Si vous saviez !
- Il n’y a rien de catastrophique à cela madame, vous êtes si belle, si présente, je suis émerveillé par vous. Je ne mesure pas la chance que j’ai dans mes vieux jours.
- Devant votre maison je rêvais, je partais avec les esprits de votre maison c’était paisible pour mon cœur malade. Ah ! Qu’avons- nous fait de nos rêves !
Le brave homme lui prend les mains, les baise, les caresse, les presse dans les siennes ; Pourrions-nous être plus chaleureux plus aimants ? : L’homme s’étonne de trouver les mots. Il l’attrape, la soulève, la prend dans ses bras, la serre contre lui.
- Je vous aime madame mes jours sont comptés maintenant, je les savoure en vous, vous êtes entrée dans ma vie comme une fée. Il lui caresse les cheveux, la bécote un peu partout.
- Et si nous prenions une boisson fraîche à l’intérieur ? :
Son histoire effacée... La maison mystérieuse… Trop de renoncements…
- Une autre fois monsieur.
Debout riches de promesses, riches de leur amour ils se quittent.
Votre twingo
Oui
Elle est belle . .
Lilian Boyrie 2010-01-09