CHAPITRE 5
Prisonnière de ses fantasmes dans sa solitude Christie écrit pendant des heures. Elle téléphone à son compagnon Tony, solide, aimant. Ils se retrouvent soit à Londres soit à Paris puis elle a ses parents, Robert son père, Nanette sa mère, Manie sa grand-mère, Amandine sa tante, ses amis Julie et Stéphane.
Dans son une pièce elle écrit assise devant son bureau sans se préoccuper du temps, les heures passent sans qu’elle s’en rende compte, concentrée, attentive. Le temps passe entrecoupé de visites à sa fenêtre ou à son frigidaire. Son abord agréable lui donne de bonnes relations avec les autres. Elle s’est installée dans son isolement y trouvant le silence qu’elle aime qui lui permet de méditer, de réfléchir.
- Allo, Tony ? Tu sais l’irrésistible envie que j’ai de t’avoir au bout du fil. Où es-tu en ce moment ?
- Dans mon bureau. Chaque fois ma chérie c’est un plaisir si grand de t’entendre, ne te bouscule pas trop avec ton travail, as-tu quelque chose en vue aujourd’hui ?
- Je pense que je vais m’aérer, je vais aller prendre un pot dans un bistrot, j’aime ces endroits.
- Mille bises Christie je dois couper. Ah ! Je souffre de ne pas te voir , à bientôt
Elle doit secouer sa nonchalance naturelle ce qui l’oblige à sortir et pour ne pas y succomber elle va partout où il y a du monde Elle traîne par plaisir dans la grande surface ou dans le métro, le r e r, les cafés où là elle trouve l’inspiration et l’équilibre qui lui sont indispensables pour écrire. Chaleureuse, plaisante elle attire la sympathie : dotée de petites exigences elle passe dans la vie « aidée par toute la famille » sans s’inquiéter. Pourtant depuis quelque temps sa vie est gâchée : ces rencontres avec le couple de la grande surface tous les vendredis la tourmente : pour mieux comprendre elle va lui donner un nom : en se grattant la tête et en se trémoussant sur sa chaise la tête dans ses mains avec un soupir arraché au plus profond de son être elle arrive à la conclusion « Je serais tellement heureuse sans cette histoire de couple qui trotte dans ma tête. Comment je vais l’appeler ? Mon Dieu ! Mais quelle histoire ! Maintenant je dois l’appeler, comment l’appeler ? Après s’être consciencieusement grattée la tête, grattée le dos, anéantie devant tous les problèmes que lui pose son histoire de couple et après réflexion elle conclue : Je vais l’appeler tout bonnement : le couple de la grande surface.
Assise à son bureau n’en croyant pas ses oreilles elle se dresse de son fauteuil tendue, croyant rêver incrédule les mains sur les accoudoirs hésitant à se lever elle tend l’oreille puis d’un bond se précipite à la porte, colle son oreille à la porte avant d’ouvrir. Quatre petits coups puis quatre autres. Elle les connaît bien ces petits coups…incrédule la main sur sa poitrine pour calmer ses battements de cœur : encore quatre petits coups, d’un geste sec elle ouvre la porte.
- Tony !
Elle lui prend les mains le palpe pour s’assurer si c’est bien lui : c’est tellement inhabituel qu’il vienne un jeudi.
Avec désinvolture Tony lui explique brièvement les raisons de son voyage impromptu : un contacte avec un collègue… Christie flaire autre chose, prudente elle se tait. : Tony avec un brave sourire appuyé contre le mur regarde.
- Comment vas-tu ?
- Tu es là, je suis au zénith : Tony tourne dans l’appartement observe Christie qui les yeux écarquillés le regarde incrédule, mal à l’aise dans son costume il secoue ses épaules desserre sa cravate en tournant la tête.
- Que fais tu demain ? Je suis libre l’après midi.
- Demain c’est le jour où je fais mes courses Tony.
- Eh ! bien ce sera un plaisir de t’accompagner : Christie le front plissé se demande comment lui expliquer qu’elle veut être seule.
- Tony, j’aimerais aller au théâtre ce soir.
- Sans problèmes tu choisis le spectacle. Mais j’aimerais aussi t’accompagner dans tes courses : Tony insiste. Je voudrais voir ce couple.
- C’est impossible Tony.
- Nous pourrions en parler !
- Pour moi c’est déjà un mystère que je n’arrive pas élucider !
- Devrait il y avoir un mystère entre nous ? Ce n’est pas un mystère puisque tu m’en parles.
- Laisse moi le plaisir de te le décrire : tu n’as pas les mêmes émotions que moi! En ce moment tu l’imagines à travers moi : si tu le vois nous aurons des incompréhensions nos regards n’étant pas les mêmes tu comprends ? Il ne faut surtout pas.
- Je suis profondément navré que tu ne me fasses pas confiance, je t’aime par dessus tout, je sens qu’une menace pèse sur toi Christie…comment t’aider... Christie émue regarde longuement Tony, elle s’entend lui dire mécaniquement :
- Non Tony tu ne dois pas le voir.
Pour ne pas montrer son désappointement il tourne la tête défait sa cravate. Sur son front perlent quelques gouttes de sueur, de la fenêtre grande ouverte un souffle d’air entre dans la pièce, les lumières obscurcies par la moiteur de l’air, la chaleur lourde, oppressante arrêtent la respiration. Ils sont accablés, malheureux de ne pouvoir communiquer.
- Christie ma chérie je n’ai jamais été aussi aimant avec une femme ; je suis prêt à faire beaucoup de concessions pour toi, je t’accompagne dans tes émotions, je veux te savoir heureuse. Après tout, un jour tu perceras ce mystère alors ce jour là mon amie sois sûre je te le promets nous serons deux à le vivre.
- Il faut attendre Tony. Il y a quelque chose en moi que je ne connais pas encore qui se manifestera un jour !
Cette incompréhension vis-à-vis de ce couple torture Christie, Pour s’en libérer elle cherche désespérément la solution. Que vont penser ses amis si elle les met au courant ! Que diront ses parents si elle leur en parle ! Sa mère, son père, sa tante Amandine, sa Manie. Elle entend Manie se révoltant contre l’éducation désastreuse que lui a donné sa fille, soupçonnant une menace sur Christie : Nanette tu manques de sévérité, de bonnes fessées lui feraient du bien ! Elle est élevée dans tout son poil ! Comment veux tu qu’elle sache faire la différence entre le bien et le mal. Mon Dieu, dans quelle misère elle s’est mise.. Son cerveau en ébullition ne trouve plus la paix ! Quel tourment !
Les traits tirés elle reprend son travail passionnée par sa nouvelle « Le bois du souvenir. » les heures passent sans qu’elle s’en aperçoive.
Partie du cocon familial pour vivre sa vie d’écrivain Christie a eu des débuts difficiles : Papa,. Maman, Mamie, tante Amandine ne cherchent qu’à plaire à leur chère Christie alors aidée par ses parents ma fois elle s’en sort. Avec beaucoup de ténacité et de courage elle est arrivée à ce qu’elle voulait, écrire. Ses qualités d’imagination, de créativité l’ont amené à suivre cette voie.
D’habitude elle gère ses émotions au gré des événements ! Mais là elle ne trouve aucune explication : son ami Tony l’appelle souvent pour la distraire ses parents ne négligent pas le téléphone non plus : en général les choses s’arrangent mais avec ce couple elle est piégée. elle ne comprend pas.. : ce couple figé sans passé à peine présent l’amène nulle part ! : Et pourtant elle ne se lassera pas de le voir tous les vendredis dans la grande surface car chaque fois elle est prise d’une émotion intense par la peur de ne plus le revoir et, lorsqu’il est près d’elle c’est le vide ;
Prise au piège d’une panique inexplicable elle va appeler Tony.
Confrontée à un irrésistible besoin de ne rien faire Christie se console comme elle peut. : Cette paresseuse invétérée n’a qu’un désir, ne rien faire. Son combat continuel contre ce fléau l’oblige à travailler comme une forcenée et lorsque elle est fatiguée elle va se consoler en ouvrant son frigidaire, où là c’est encore un autre combat livré contre sa gourmandise car pour clôturer cette lamentable paresse elle est gourmande. Si elle se laissait aller elle empiffrerait des gourmandises toute la journée : alors elle ouvre son frigidaire plusieurs fois par jour pour le plaisir sans rien prendre en soupirant. Aujourd’hui après une longue réflexion devant son frigidaire son choix va vers un petit fromage blanc sans sucre. La conscience tranquille elle va le goûter assise devant son bureau. Son travail rythme ses jours : elle se distrait en regardant par la fenêtre les blocs, les heures passent... de la fenêtre à son bureau de son bureau à sa fenêtre ce va et vient rythme sa vie.
Devant son bureau énervée, inquiète elle attrape une photo de Tony, prend son portable hésite à l'appeler replace la photo : Les feuilles s’empilent les unes sur les autres. Son portable la suit partout, la rassure c’est le lien entre Tony, Manie, Papa, Maman, tante Amandine.. Son stylo et son portable lui collent aux mains. Les visites régulières de sa tante Amandine les appels répétés de Tony de Manie de papa de maman et de tante Amandine la réchauffent. Accablée par le couple de la grande surface elle pousse un immense soupir regarde sa montre puis rapidement met de l’ordre, s’habille en toute hâte, prend son sac ses clefs de voiture, préfère l’escalier à l’ascenseur qu’elle dévale à toute allure, c’est l’heure. elle va retrouver ce couple « ses ravageurs amis : le couple de la grande surface » Ce besoin vital d’aller dans les endroits publics à la rencontre de gens , dans les lieux où elle va, ce contacte qu’elle veut, un échange de quelques mots la sort de son isolement. Sans complexes elle est à l’aise dans la grande surface Cette ambiance lui sied à merveille ces quelques mots la réconforte parfois il y a quelques déceptions : les gens la regardent indifféremment, contrite elle s’éloigne, s’accuse d’être maladroite mais ne renonce pas. En général les gens sont courtois. Mais en ce moment son obsession c’est le couple de la grande surface, elle ne pense qu’à lui. Sa mémoire visuelle des êtres et des choses a souvent étonné ses parents ! Sa Manie s’étonne : Christie tu me parles de personnes que j’ai vu il y a bien longtemps ! Comment veux tu que je m’en souvienne. Tu es phénoménale de te souvenir de tout : tu me les décris comme si tu les avais devant toi.
Christie en soulevant sa poitrine afin de mieux respirer se lève va à la fenêtre. Je dois achever mon roman rapidement. Mais pas plus à la fenêtre qu’à son bureau elle n’arrive à trouver la concentration qui lui est indispensable pour écrire. Passant plusieurs fois sa main sur son front, tassée, le regard vide devant ses feuilles les yeux fermés avec efforts elle cherche à revoir le couple de la grande surface. Tourmentée entre son roman d’une part et son couple d’autre part elle frissonne, se lève va à son miroir. : Le miroir lui renvoie une image qu’elle ne reconnaît pas, un visage défait, tendu, aux traits tirés. Elle essaie de comprendre ce qui lui arrive secoue sa tête violemment pour ôter cette fixité étrange respire plusieurs fois afin de se détendre. : Enfin délivrée de cette obsession elle revient à son bureau bien décidée à terminer son roman et à tourner une page sur cette histoire des plus rocambolesque. Elle se lève arpente sa pièce en se tapant le front puis de nouveau à son bureau tapote ses feuilles, rature, hoche la tête, relit approuvant,