Zéro de conduite ;
C’est étrange, chaque fois hormis la perspective d’une promenade, chaque fois Lucien s’amène avec son journal Le Monde. Nous, nous saluons en échangeant quelques mots sur le temps sur notre santé des mots bienveillants, nos yeux errent dans les arbres verdoyants d’espèces variées de chênes majestueux très vieux d’age d’un tilleul qui se développe tous les ans un peu plus, autour, des arbres, d’autres espèces, d’autres verts, une nature luxuriante, florissante, un engourdissement nous oblige à nous sortir de ce sortilège ; Lucien d’un regard m’interroge : rien.
J’aime ces moments où Lucien près de moi m’envoie, m’encourage d’aller dans mon monde imaginaire, Le Monde dans ses mains ouvert sur les dernières nouvelles il comprend qu’une histoire se trame, une histoire du temps passé une histoire fantastique, des histoires vécues.
Là, aujourd’hui pourquoi le diable m’importune t-il ! Je regarde Lucien afin de me rassurer.
Je venais de recevoir mon carnet de notes trimestrielles à peine l’avais-je ouvert je vis un énorme zéro il avait envahi la page, j’étais les yeux braqués sur ce zéro avec des pleins et des déliés dessiné par une main pleine d’autorité de menaces, j’étais paralysée par la peur de devoir faire signer mon carnet juste dessous ce zéro !
J’attendais la réponse à la question qui me faisait tressaillir d’effroi, comment faire signer mes parents juste au dessous du zéro ! Et à ce moment la bonne voix de Manie.
- Mon petit amour (Manie n’était pas avare de mots doux lorsque elle me parlait) as-tu de bonnes notes ce trimestre ci ?
- Oui Manie.
- Je connais ma petite Christie. Tu as des qualités.
Ma Manie m’envoyait dans des endroits inatteignables ! Je l’écoutais émerveillée.
- Tu le crois Manie ?
- Tu sais bien comme Manie t’aime, que son cœur déborde d’amour pour sa petite fille, je crains pour toi amie les difficultés que tu rencontreras dans la vie, tu es si innocente, imprévisible si étonnement fantaisiste, tu vas droit au but que tu te fixes. Tu m’écoutes Christie, fais attention certaines voies doivent être rayées impérativement de ta route, réfléchis bien avant de t’engager.
Christie contrite la tête baissée les épaules affaissées retrouve son carnet de notes où trône un énorme zéro de conduite.
Torturée, affolée à l’idée de montrer son carnet de notes à sa mère dans un isolement complet, alors, plusieurs idées germent dans sa tête : elle pourrait imiter la signature de sa mère mais après plusieurs essais elle rejette cette idée, elle trouve croit-elle la solution en cachant le zéro avec un doigt elle s’exerce et ma fois est satisfaite
Textuellement il était écrit : 0 de conduite : a préféré aller au cinéma plutôt qu’à son cours d’instruction civique.
J’étais étonnée que cela ce soit su car personne ne m’en avait parlé
Nous, nous étions mises d’accord mes copines Charlotte et Cécilia pour sécher le cours d’instruction civique, le remplacer par un film au titre attirant : Désirs de femmes ; J’ai beau me titiller la mémoire je ne me souviens pas de l’histoire ! J’étais tombée amoureuse de l’acteur principal.
Nous étions demi pensionnaires ; nous avions concoctées notre sortie du collège et tout s’était passé très bien, ce fut assez facile, nous sortions les unes après les autres pour ne pas se faire remarquer.
Bizarrement le film est sortie de ma mémoire.
Le moment fatidique arriva !
- Maman ! Veux-tu signer mon carnet s’il te plait !
Je tendais le carnet le doigt sur le zéro !
- Allons sort ton doigt voyons tu me gênes.
Ce fut la meilleure surprise que j’eus dans ma vie. Je tremblais de tout mon corps mes yeux s’étaient agrandis dix fois, mon cou s’avançait se reculait, ma tête se levait et tout mon corps allait de mon carnet à ma mère.
- C’est bon Christie, tu ranges ce carnet, et sur un ton sévère, compris !
Je crus recevoir une foudre sur moi, est-il vrai qu’il y ait de bonnes foudres ! Celle-ci fut étincelante pleine de million d’étoiles. J’allais ranger mon carnet infiniment légère.
Liliane Boyrie 06/09/2011