07/07/2012
La rue, large saignée au milieu des immeubles, sur le trottoir des gens affairés, l’allure rapide, quelques-uns s’arrêtent devant l’antenne d’un magasin, rentrent, ressortent un paquet dans la main, puis la démarche élastique reprennent leurs destinations ;
Les voitures avancent, ralentissent puis tournent, Eloi derrière la vitre frémit, tout éveillé il rêve qu’il s’engouffre dans un tunnel les deux bras écartés, le front moite il sort son mouchoir, s’essuie.
- Voilà- t-il pas Eloi ! Je ne trouve pas le papier où j’ai mis le rendez-vous avec le comte : ça m’embête, j’organise mes plans à l’avance : vous ne l’auriez pas vu par hasard ?
- Non ;
- Le voilà.
- Alors ?
C’est samedi prochain. Je ne comprends pas pourquoi les repas se font toujours le soir !
- C’est dans les us et coutumes, les repas s’organisent le soir, il y a plus de convivialité, le meilleur moment pour les confidences peut-être ! A propos j’ai eu le comte avec mon portable, il m’a complimenté, m’a fait l’éloge de tes qualités, ta réserve, ta rapidité à comprendre, comprendre les petites moqueries, canailleries, coquineries, eh ! Bien oui, ma chère, il a employé ce vocabulaire, ça m’a amusé. Je ne le croyais pas capable de faire des entraves à notre belle langue, c’est tout naturellement qu’il s’est exprimé, j’étais amusé, enfin pour conclure : l’homme est fin, très cultivé, tu risques de rester dans la passoire, anéantie.
- Pourquoi anéantie ?
- Il cherche la faille s’en sert habilement sans que tu l’aies comprise, c’est un fin psychologue qui use avec talent de ses pouvoirs de séduction. J’ai ouï dire que tes congénères l’entourent à qui mieux, mieux, lors des réunions !
- Comment mes congénères tu pourrais avoir un langage plus châtié ! Soigne ton vocabulaire à ton tour !
- Ah ! Oui… il m’a dit aussi : c’est le plaisir d’être en communion ensemble, il souhaite que ce soit en toute simplicité, il a insisté sur le mot simplicité, qu’il n’y ait pas d’embarras c’est ce que j’ai cru comprendre, à dominante amicale, j’ai eu l’impression que c’était son désir.
- Il était d’humeur vraiment charmante, c’est vrai une compagnie dès plus réjouissante, une humeur enjouée, un véritable rafraîchissement, une impression agréable qui persiste. Je suis curieuse de voir sa future femme, de quel genre de femme un tel homme a-t-il pu s’amouracher ! Il fait des étrangetés avec sa canne : ce grand dégingandé s’infiltre avec adresse dans la société d’un au rang. Il est richissime d’après ce que j’ai cru comprendre.
Eloi pensif son regard dans le vague.
- Nous n’avons aucun souci à nous faire, ça marche bien, dans une fraction de seconde il réalise qu’il vient de parler à Délice.
- Sans soucis.
- Vous êtes étrange Eloi, tout va bien vous êtes sûr ? Votre travail ?
J’ai eu les félicitations du grand patron.
- Alors c’est autre chose. Vous devriez aller consulter un spécialiste, un psychologue, un psychiatre, vous avez des allergies peut-être ! Il semble qu’un souci vous habite, vous devriez en parler à quelqu’un je vous assure.
- C’est ainsi que vous me voyez ! Je vais y réfléchir toutefois je tiens à vous enlever ce souci qui vous perturbe, ça va. Il pousse un soupir qui sort du plus profond de son être et qui n’en finit plus.
Marguerite reprend son travail de ménagère.
Le comte confortablement assis dans la salle de réception tape plusieurs fois sa canne, lui fait faire maints exercices avec un évident plaisir. Dans cette immense pièce il se permet toutes ses fantaisies, là, personne ne le dérange : la salle est réservée aux réceptions où brille le gotha du tout Paris, des pays du Moyen Orient, de l’Afrique du Nord, de Chine, des Etats Unis de Russie, du Maghreb, des pays émergents ; C’est dans cette mondialisation qu’il puise toutes ses richesses.
Le comte pense à l’invitation samedi de monsieur et madame Britte, monsieur et madame Risquetou, il tapote sa canne se lève pour tirer le cordon.
Henri se présente.
- Monsieur désire ?
- Henri samedi je reçois, il faudra préparer la salle à manger, nous serons six tout devra-t-être normal, pas de falbalas ; J’aimerais parler à Rose, faites-la venir.
Henri disparait, revient accompagné de Rose. Rose la cuisinière déjà d’un âge avancé garde une fraîcheur agréable, elle est avenante, souriante c’est consciente de la responsabilité de la bonne marche de la demeure du comte qu’elle se présente. .
- Monsieur ?
- Rose je fais une réception samedi vous préparerez la table pour six personnes dans la salle à manger. Faites une table accueillante pas d’outrance dans la vaisselle, agrémentez de petites fleurs, qu’il y ait des couleurs, arrangez-vous pour que ce soit cordial, de bon goût tout en étant simple.
Rose approuve d’un hochement.
- Je ferais comme monsieur désire, pour le repas ?
- Pour le repas vous me ferez part de vos idées, nous en discuterons. Je vous remercie.
Elle se retire.
Henri prêt à se retirer, le comte le retient, il lui tend un livre où il note le nom des invités. Voyez, sur cette page les invités de samedi. Vous les recevrez simplement, essayez un sourire.
- Tout étincelle en vous Délice. Comment saurai-je la robe que vous allez mettre ! Essayez de vous informer avec votre amie Fraise ! Allez, si nous allions la voir ? Voulez-vous ?
- Pensez-vous qu’il soit nécessaire d’aller l’interroger ? Sa garde –robes est garnie de robes de grands couturiers : non, vraiment monsieur, je vais trouver, là ; elle pousse les battants de sa garde –robes, vous voyez comte je n’en manque pas ! Donnez-moi votre avis, ses mains adroites poussent les cintres les uns après les autres : laquelle d’après-vous ?
Le comte papillote des deux yeux plusieurs fois devant le délicat problème tape quelques petits coups avec sa canne regarde Délice comme s’il ne l’avait jamais vue, écarquille ses yeux, toussote, racle sa gorge, renvoie une salve de battements de cils enfin dit quelques mots qu’il bredouille, tend son cou vers le placard puis devant l’insondable problème se rassoit.
- Vous allez monsieur ?
- Oui ma petite Délice : je vais.
- Voyez comme c’est difficile de choisir une robe ! Je pourrais mettre la robe couleur de peau qui prend les formes elle s’appelle Vénus, je la passe, rapidement, quelques gestes adroits, elle s’avance, le comte hébété devant cette splendide femme ondoyante est statufié, enfin il retrouve ses sensations, tente quelques mots timides cherche sans la blesser de la convaincre : mettre une robe toute droite.
Délice pousse les cintres s’arrête devant une robe multicolore, l’enfile prestement toute fière se présente devant le comte
- Regardez !
Le comte est assis il peut réunir toutes ses forces vitales pour affronter la beauté de Délice, il va de merveilles en merveilles, de robes en robes, de couleurs en couleurs, les couleurs de l’arc-en-ciel dans Délice amusée et dans un dernier sursaut de lucidité il tente d’aller voir les robes, toutes sont faites pour faire de Délice la reine de la soirée. Il pense à madame de Risquetout, tape sa canne prend Délice par le bras, venez ma chère nous allons chez nous, faites vite, le chauffeur attend. Je descends j’ai quelques affaires importantes à régler avec madame Irène.
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