05/01/2013
Dans l’aube naissante le comte et Délice dans la petite salle à manger vont prendre leur petit déjeuner. Avec la régularité d’un métronome le comte lit son journal en prenant son petit déjeuner toujours à la même heure. Il sonne Rose, elle arrive avec un sourire mêlé de respect, et tous les matins elle prend commande du petit déjeuner, demande des nouvelles de monsieur. Le comte se lève tous les matins à l’aube naissante et ceci depuis toujours, il lit les dernières nouvelles ; s’informe des repas du midi, du soir.
Délice n’oublie pas de l’informer lorsqu’elle passe ses soirs, ses nuits chez son amie Fraise ou chez la tante Irène, avec un mot sur la table.
Rose attend.
- Madame Délice déjeune avec moi, Rose.
- Bien monsieur
- C’est sa coutume de faire trainer son petit déjeuner en lisant son journal mais ce matin il reste plié. Embarrassé il frappe la table de son doigt.
Délice a mis ses espoirs dans le détective monsieur Détecté ; Le prince Sergey croise son chemin partout où elle est et, pour calmer ses angoisses elle joue de la harpe encouragée, félicitée par Fraise. Pour se rassurer elle téléphone à ses parents, leur envoie des mails, elle ne trouve plus le courage d’aller les voir, ses amis Fraise et Wladimir arrivent à la distraire. Seul le comte avec ses fantaisies pleines d’imagination calme la douleur de son cœur
- J’ai des nouvelles Délice elles sont minimes mais c’est un pas vers notre but.
Un plaisir évident dans l’attente de Rose avec son plateau garni de petits croissants, de pains aux raisins de petites brioches et la surprise de la confection de petits gâteaux faits par la cuisinière, Délice assise en face du comte s’informe si la matinée est bonne, manifeste ses regrets de ne pas être plus souvent avec le comte la cause : l’heure matinale. Le comte ému prend ses mains puis papillote violemment ses yeux, irrésistible, il envoie Délice par mimétisme à faire quelques œillades ce qui pousse le comte à tapoter sa canne.
Le comte lui souhaite bon appétit.
- Ah ! Monsieur les petits déjeuners de Rose !
Plusieurs petits pots garnissent le plateau Rose pose délicatement les petits gâteaux, les viennoiseries, les petits pots de confiture choisis avec soin, la gourmande Délice sait aller dans la cuisine, mettre son nez dans les casseroles sur le feu, donner son avis, instruire Rose sur un plat inconnu.
Rose au service du comte depuis son jeune âge savait les goûts du comte, elle tentait de varier les mets, c’était sans conviction, le comte semblait indifférant à ses efforts, la venue de Délice avec sa gourmandise lui donna envie de créer des plats, elle rayonnait.
- Vous avez transformé ma cuisinière, Délice, je la connaissais depuis mon adolescence, appliquée, fidèle, je m’en contentais, ses plats cuisinés m’allaient, voilà, depuis que ma petite Délice est là, tout s’est transformé ! Même Rose est plus enjouée, plus vivante, je savoure sa cuisine, que lui avez-vous fait ?
Délice toute rose un petit gâteau dans la main prêt à être dégusté, goûté, savouré en fermant les yeux, regarde le comte.
- Rien monsieur.
La confiture de Rose est excellente, les petits pots ouverts, admirés avant de les goûter les uns après les autres, savourés d’avance, un choix difficile.
- Quel dommage si Rose ne vous avez pas rencontré ! Tant de talents perdus ! Moi qui n’avais pas connu le plaisir de manger, j’engouffrais la nourriture que faisait Rose, je mangeais, une nécessité rigoureuse pour éviter mes maux d’estomac. Ma délicieuse Délice la fée de ma demeure me fait connaître les plaisirs du palais. En ce moment le spectacle que vous m’offrez est un bonheur. Je reconnais que Rose nous gâte avec ses petits déjeuners pleins d’astuces.
Délice mastique lentement pour savourer avant d’avaler, elle encourage le comte à prendre son temps et chaque fois Délice apporte au comte un bien-être, la paix.
Le comte se calle sur sa chaise en admiration devant l’appétit de Délice pousse un soupir de contentement, se saisit de sa canne, pousse un autre soupir se surprend à dire à haute voix.
- Vous avez Délice une magnifique silhouette, souple, élancée que vos amies doivent envier, sans privations ! Avec un plaisir incommensurable à goûter les plaisirs de la vie ! Je vois en vous un suprême bonheur dans ce moment, voyez, en moi un homme heureux.
- Ce plaisir je l’ai avec vous monsieur, aucun tourments ne m’habitent avec vous, mes soucis partent, avec vous monsieur lorsque nous sommes tous les deux j’ai comment vous expliquer, un lavage de mon être.
- Un lavage !
- Oui monsieur c’est un peu ça. ! L’oublie des trahisons qui m’ont été faites, la période que vous connaissez. Avec vous je passe de l’autre côté c’est pour moi une renaissance, et de plus vous avez le pouvoir de deviner. Prenez, s’il vous plait, d’un geste gracieux elle lui tend un gâteau : c’est le meilleur.
Le comte observe Délice, une contraction de la bouche, un frémissement des yeux.
- Comment trouvez-vous le détective privé monsieur Détecté ?
- Très drôle, un pittoresque personnage, émouvant, un fin limier. Je lui fais confiance. J’ai fait des efforts pour ne pas pouffer de rire. Il a d’étranges manies, et vous ?
- J’ai pris rendez-vous pour la semaine d’après, je suis curieux. Pour agrémenter son vocabulaire il fait taper sa canne et en même temps réjouit Délice. J’ai eu en conversation de Risquetou qui dans son jargon châtié me l’a décrit comme un personnage original, j’ai hâte de le voir.
Par contre mes recherches ont abouti à faire diffuser le nom du prince Sergey dans tous les rangs de la société : voyez l’ampleur ! J’ai eu d’étranges révélations contradictoires que je démêle patiemment dans de multiples pensées qui m’ont envoyé en Sibérie ; Nous allons, Détecté et moi tenter de démêler cet imbroglio.
- Si loin ! En Sibérie monsieur, oh ! Comment aller si loin ! C’est si vaste là-bas ! Il y fait si froid ! Les terres sont gelées ! La nature est pétrifiée ! C’est un grand malheur que vous m’annoncez là !
Le comte tend sa pochette pour essuyer ses beaux yeux puis envoie sa canne maladroitement, elle tombe sur le petit déjeuner ! Délice épouvantée regarde le comte puis la table, part d’un éclat de rire ce qui fait aller la canne du comte autour de la table ;
- Quelle merveille vous faites là, vous êtes en progrès constant, je suis éblouie par vos prouesses ; Je pourrais essayer ! Voulez-vous m’apprendre ?
- Oh ! Délice j’y passerai ma vie.